Nos pères, ancêtres de l’autre terre
N’auraient accepté la nouvelle ère
Agrippé au contact de ce vif paysage
Une débordante charrette à bœufs de l’usage
Encalminée sur la plaine du sud escarpée
Où fument les cheminées d’usine prostrée
Elle tirait tristes comme ses bœufs
Les fardeaux de cannes, bords cahoteux
Qui se traînaient sur le sol bitumeux
Et leurs essieux martelaient grincheux
La souffrance de leur carriole vétuste
Qui chaque année montrait fière le buste
L’homme au port royal dirigeait la manœuvre
Piaffait autoritaire pour parfaire son œuvre
Paisible, d’ici de là grommelait ses ordres
Mais la charge impudique faisait tant désordre
Que les livides bœufs de frayeur titubaient
Au long de ces trajets d’efforts inadaptés
Au soleil de midi au jeûne d’un unique repas
Les bœufs n’espéraient plus que le trépas
Ils rêvaient ankylosés aux pâturages frais
D‘eau abondante et vive, bue sans effet
Quand le fouet caressait leur squelette tanné
Pour une faute injustifiée jamais élucidée
Les bœufs fatigués gardaient un œil vigilant
Sur leurs roulants cousins avoisinants
Qui les dépassaient sans soupçon de nostalgie
Les affaiblissaient de leur fallacieuse magie
Ces moteurs qui crachaient tout leur carbone
Pour réussir une campagne sucrière hors norme
Les bœufs garderont toujours flatteur en mémoire
La caresse de l’enfant innocent qui sait croire
Qu’en leur douleur ils n’auront pour vrai gloire
Que de donner sans répit la rentable victoire
A ces maîtres nantis qui les affectionnent
Pour se garantir le profit qu’ils ambitionnent.
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